mercredi 27 mars 2013

Les ballets Russes/ Russian ballets

Depuis longtemps les "Ballets russes" me fascinent...


Il y a un avant et un après les "Ballets russes" : dans le Paris de 1909 cette compagnie de danse, menée par Serge Diaghilev, provoque avec ses spectacles un véritable choc culturel et mondain. 


Le public parisien découvre une vision de l'univers slave, nouvelle et exotique, avec des accents orientaux qui influenceront la mode de l'époque : l'intensité des couleurs et les broderies des silhouettes proposées en 1910 par Léon Baskt dans « Shéhérazade » inspirent le couturier Paul Poiret et donnent libre cours à son imagination : turbans, tuniques, drapés, deviennent sa marque de fabrique. 


Il met d'ailleurs en scène cet univers opulent en organisant des fêtes spectaculaires, comme la fameuse « Mille et deuxième nuit » -qui marquera les nuits parisiennes- ou "la fête de Bacchus" au cours de laquelle Isadora Duncan dansera sur les tables, au milieu de 3OO invités et 900 bouteilles de champagnes seront consommées en une seule nuit!

Illustration de Léon Baskt


Illustration de Léon Baskt 
(créateur des décors et costumes pour les Ballets Russes de entre 1909 et 1921)


Dans la série "Downton Abbey», on retrouve d'ailleurs un petit clin d'oeil à cet engouement orientaliste lorsque, Lady Sybil, la plus jeune et indépendante des héroïnes, montre avec fierté ses pantalons harem et son bustier brodé...




"Downton Abbey"  (Julian Fellowes/Royaume Uni)

Dés le début des années 1910's, le public est séduit par l'esprit d'avant-garde de cette troupe. La modernité fera partie désormais de son ADN. 


Et l'intérêt ne cessera de grandir car Diaghilev cherche constamment à renouveler les spectacles en s'entourant de la créativité d'artistes en devenir ou confirmés: Cocteau, Picasso, Miro... qui modernisent l'art du ballet et apportent une nouvelle énergie. Stravinsky plonge le public dans une musique faite de dissonances, l'expressionnisme influence les chorégraphies, Nijinsky séduit par son exigence technique : une page se tourne, le ballet devient de l'art moderne et un terrain d'expérimentation.

          

Illustration de Léon Baskt 

Après la Révolution bolchevique de 1917, une communauté de Russes blancs et d'artistes doit s'exiler à Paris. C'est le cas des danseurs des Ballets russes qui deviennent une troupe de réfugiés en tournée. Ainsi, dans les années 20, les russes en exil influencent le milieu culturel et artistique parisien, au coeur duquel se trouve alors Coco Chanel. 


Inspirée par l'univers  russe et cosaque, Gabrielle Chanel crée à cette période le parfum "cuir de Russie" et intègre des broderies et des roubachka (tuniques folkloriques russes) dans ses collections. Elle engage de nombreuses couturières, vendeuses et modèles russes dans sa Maison et collabore avec la Grande-duchesse Maria Pavlovna Romanova.

Depuis 1913, elle suit de près l'univers créatif slave, bouleversée par "Le sacre du printemps", ballet russe avant-gardiste, présenté au théâtre des Champs Elysées qui provoque un véritable scandale à l'époque.




L'impact de ce ballet est très bien traduit dans le film "Coco Chanel et Igor Stravinsky" de Jan Kounen (2009) qui nous fait ressentir la violence visuelle de la chorégraphie d'inspiration païenne de Nijinsky et les rythmes féroces de la musique de Stravinsky. Ainsi que l'émotion de la créatrice, séduite par le talent et la modernité du compositeur.

Il s'agit de leur première « rencontre ». 7 ans plus tard, Igor Stravinsky fuyant la Révolution russe, se réfugie à Paris et Coco Chanel l'accueille lui et sa famille dans sa maison de campagne Bel Respiro (reconstitué avec sobrieté et élégance dans le film : éléments Art Déco, motifs géométriques, noir, blanc et ivoire omniprésents rappellant les couleurs de la maison Chanel et le piano et les partitions de Stravinsky). Une relation amoureuse (vouée à l'échec) commence...



"Coco Chanel et Igor Stravinsky" Jan Kounen 2009 (Anna Mouglalis & Mads Mikkelsen)

A partir de 1919, Chanel travaille en 4 occasions avec Diaghilev et apporte un nouvelle impulsion à la troupe. Dessiner des costumes pour un ballet est pour elle l'occasion de d'atteindre la liberté de mouvement qu'elle recherche aussi pour les femmes dans sa propre Maison de couture. 

En 1924, elle crée tous les costumes du spectacle le « Train bleu » (ballet qui doit son mon au train inauguré 2 ans auparavant reliant Paris à la Côte d'Azur) et conçoit pour ce ballet des modèles d'allure sportswear en jersey! 

Elle croise dans ce projet Jean Cocteau, qui crée le livret, Picasso qui conçoit le programme...



 Coco Chanel et son ami Serge Lifar, danseur de la troupe dans les années 20



Jusqu'à la fin en 1929, la vitalité des "Ballets russes" reposera sur cette volonté de collaborer, d'expérimenter et de croiser toutes les formes d'expression artistique, évoluant  des spectacles slavo-orientaux de 1909 au jazz et au futurisme des années 20/30. 

Cette compagnie trouvera sa place et contribuera à la créativité de la Belle Epoque tout en marquant plus tard les Années Folles grâce à l' esprit d'avant-garde de son imprésario. Des Ballets Russes menés et marqués par la personnalité de Diaghilev, directeur artistique hors du commun qui fit toujours passer l'intérêt de la troupe avant tout. 

De 1907 à 1929, malgré le soutien de nombreux mécènes et les succès des représentations, Il devra faire face à des difficultés économiques. Il meurt à Venise, ruiné, en 1929 (Gabrielle Chanel paye ses funérailles), la troupe se disperse... 


Affiche des Ballets russes
Février 1930

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